Quelles sont tes racines ? Et quelles étapes t’ont amenée à être celle que tu es aujourd’hui ?
Au moment de quitter la maison familiale, j’ai écrit sur mon carton de souvenirs d’enfance, cette phrase de Saint-Exupéry : « On est de son enfance comme on est d’un pays. »
De fait, cette place de petite dernière et celui de porter un prénom qui est celui de ma mère et le nom de mon père, m’enracinent.
Enfant, je croyais que l’on s’appelait comme son papa et sa maman. Cette croyance ne résista pas à l’examen empirique de la première socialisation… mais il restait un zeste de vrai… Soizic, « petite Françoise », comme ma maman. Françoise, du mot « franc, franche », qui renvoie à la liberté reçue, celle de l’affranchi, autrement dit, du libéré. Sur parole.
Jeunes amis, collègues, élèves… me disent quelque chose de celle qui advient quand je consens à répondre à cet appel à vivre de l’Unique dans le service de tous.
Et mon patronyme « Vasseur », qui évoque le lien de fidélité médiéval du vassal, de celui qui, mains tenues et maintenant, s’engage. Une liberté engagée. Ce qui m’a amenée à ce troisième prénom, devenu second, celui de Marie. Engager ma liberté, tantôt comme un « pourquoi pas ? », tantôt comme un « oui ». Un « oui » dans lequel j’entends ce que je suis. Parfois, je l’entends seul et seule. Plus souvent, j’entends les autres. « Mais toi, c’est pas pareil… », « Toi, tu parles à tout le monde », « De toute façon, vous nous aimez bien… ». Jeunes amis, collègues, élèves… me disent quelque chose de celle qui advient quand je consens à répondre à cet appel à vivre de l’Unique dans le service de tous.
Quelles espérances ? Quels projets ?
« Parce que le Christ est votre vie, moi, je crois en vous. » Je pourrais signer ces mots du Père Guérin, le fondateur de la JOC (Jeunesse ouvrière chrétienne). Je ne m’explique pas autrement que les responsables de la Mission de France aient pu penser à moi pour cet engagement auprès du Service Jeunes, qui m’amène à effectuer pour la prochaine rentrée cette transhumance vers Ivry-sur-Seine, où je me sens aussi attendue par Madeleine Delbrêl comme par une amie. Pour le reste, c’est devant qu’il faut regarder ensemble, avec son cœur, car « Donnez à mon cœur faible et de pauvres limites, / Mon cœur à si grand-peine, aimant et fraternel, / Dieu patient, des œuvres lentes et petites, / Donnez à chaque instant mon amour éternel » (Marie Noël).
Une rencontre à partager ?
Dominique, un ami qui vient de nous quitter. Il était metteur en scène à Avignon, et l’époux de ma professeure de chant. Je leur dois à tous les deux cette expérience d’une parole incarnée.
Créer au service, quelle humilité cela demande… Et cette humilité libère.
Ils m’ont fait découvrir que mettre en scène au théâtre, c’est mettre sa force de création au service du texte, de la parole d’un autre, et d’un collectif. Créer au service, quelle humilité cela demande… Et cette humilité libère. J’en ai fait doublement l’expérience. D’abord en tant que spectatrice de la pièce Épître aux jeunes acteurs, d’Olivier Py, où j’ai reçu avec une force quasi thaumaturgique : « Que faut-il pour que ma parole vive ? Qu’elle soit entendue ! », juste après l’expérience douloureuse d’une parole qui abîme. Puis, en tant qu’élève dans l’atelier de chant où, avec Sandrine, le travail du corps, de la voix, des émotions, ouvre sur le partage de ce que nous sommes en vérité. Il paraît que la vie éternelle, c’est ce qu’il y a d’éternel la vie. Cette rencontre en fait partie.